Santé, bien-être, intimité

Mon cœur a mal…

Avant-hier soir, j’y étais… Et j’ai eu très peur. Je n’étais pas sur le lieu précis du massacre, mais j’ai été prise par le mouvement de foule en panique qui est soudainement arrivé vers nous. Là, tout a basculé en un quart de seconde.

Comme des milliers d’azuréens et de touristes, nous étions venus voir le feu d’artifice du 14 juillet sur notre belle Promenade des Anglais. Passer un bon moment entre amis ou en famille. La joie et la bonne humeur était au rendez-vous. Personne n’avait rien demandé…

Mais voilà que le sort en a décidé autrement. Nous amorçons tranquillement le chemin du retour, quand tout à coup, nous voyons arriver sur notre gauche une foule courant et criant, l’air paniqué. Il nous faut un temps pour comprendre, et l’on ne comprend d’ailleurs pas bien ce qui se passe malgré tout, mais un ou deux regards où se lit la peur et un « Il fonce sur nous ! » me font réaliser qu’il y a un danger et qu’il faut courir !

C’est tout ce que l’on sait à ce moment-là. Courir. Vers chez nous. (Pas à côté d’ailleurs, je n’ai jamais rejoint mon domicile à pied aussi vite !)

Nous étions avec des amis, la cohue nous sépare, nous ne partons pas dans les mêmes directions ! Je suis avec le Doudou que je ne lâche pas un seul instant, et un de nos amis. Nous apprendrons un peu plus tard que nos deux autres amis se sont réfugiés dans un restaurant qui a fermé sa grille pour protéger les gens à l’intérieur. Nous croisons des personnes en pleurs, ayant perdu leurs proches dans la foule. Ça me fait mal au cœur.

Au bout d’un moment, nous arrêtons de courir pour laisser place à une marche très rapide. J’ai peur, je ne me sens pas du tout en sécurité, nous croisons encore de temps à autre quelques personnes qui courent, mais mon ami me dit qu’il est préférable d’arrêter de courir, que ça effraye encore plus les gens, et que tout ceci n’est peut-être au final qu’une « fausse alerte » , ou du moins pas si grave que ça en a l’air, peut-être simplement un gars bourré qui aurait fait peur d’une quelconque façon… en conduisant d’une manière imprudente ou en se baladant avec une arme à la main… Au vu de toutes les horreurs qui se sont passées ces derniers temps, tout le monde est à cran et peut vite paniquer sans « réelle » raison. C’est vrai. C’est possible. Néanmoins, je ne peux m’empêcher de ressentir un sentiment d’insécurité énorme. Nous ne savons rien. Nous entendons par moment des mots tels que « attentat » , « bombe » , « tir »… Cela vient-il de l’imaginaire des gens ou est-ce bien réel ? Je croise un ou deux véhicules sur mon chemin. Je sursaute à chaque fois. Y a-t-il un terroriste prêt à tirer à bord ? On s’imagine tout dans ces moments-là.

De retour à la maison, je veux savoir. On lit sur Internet que ce serait un camion qui a foncé sur la foule. Moi, ce qui me marque c’est : « Du sang partout et beaucoup de blessés ». Je commence à réaliser. À réaliser que j’ai réchappé à quelque chose de très grave. Je veux en savoir plus, allumer la télé, suivre les informations, mais Olivier me dit que ça sera pire pour moi, qu’en plus les premières informations, à chaud, sont souvent erronées, exagérées, non confirmées… Il me dit qu’il vaut mieux aller se coucher, en attendant de voir demain. Demain… mais c’est loin demain.

Je suis crevée mais je n’arrive pas à dormir. Et puis j’entends le corso incessant des pompiers qui ne cessera que beaucoup plus tard. Je prends du Rescue, juste au cas où, me dis-je. Je commence à cogiter. Je me dis que ce soir nous aurions pu mourir. J’imagine les pires scénarios. Je prends conscience de ce qui s’est passé, que c’était bien réel. Et puis je sens tout d’un coup un truc se passer dans mon corps. Mon cœur bat plus fort, mes membres commencent à fourmiller… N’en dites pas plus, bienvenue à la petite crise de spasmophilie ! Je me redresse dans le lit, et mon corps lâche. Tout mon corps se met à trembler et les larmes se mettent à couler. Je reprends du Rescue. Je respire profondément. Je bois de l’eau. Je me dis que ce n’est rien, le Doudou est avec moi, juste une petite crise d’angoisse. Nous sommes vivants, nous n’avons rien vu du carnage, ce n’est certainement pas moi qui suis à plaindre, oh que non ! Mais le fait est que je suis hyper sensible, donc je craque.

Et puis, 5 minutes après, encore tremblotante, les textos commencent à arriver sur mon téléphone. Il est minuit. Mes amis et proches me demanderont de mes nouvelles et me soutiendront jusque vers 3 heures du matin. Des amours. D’autant que parmi eux, il y avait l’adorable Stephie Green, que je ne connais pour le moment que virtuellement : nous ne nous sommes jamais vues ni parlé « en vrai » , que ce soit en face à face ou au téléphone. Nous nous sommes seulement échangé nos numéros en décembre dernier, au cas où, lors d’un swap, ou plutôt d’un anti-swap. 😉 Et depuis nous discutions uniquement sur Facebook. Comme quoi, on peut se faire de vrais amis via les réseaux sociaux. Bref, merci beaucoup pour ton soutien Stéphanie, ça m’a beaucoup touchée. Merci à tous d’avoir passé une petite partie de la nuit avec moi, ça m’a aidé à atténuer mes tremblements et à ralentir mon cœur. Je me suis sentie bien entourée. 🙂

Mais j’apprends aussi par le biais de ces amis l’ampleur du drame. Je n’ai pas Internet sur mon téléphone, je ne suis pas non plus sur mon ordinateur, alors je leur demande. Je veux savoir. Et j’apprends. Déjà une soixantaine de morts… J’ai mal au cœur. Littéralement. Encore maintenant. J’ai l’impression qu’il s’est brisé en plusieurs morceaux. Je remercie le ciel pour être indemne. Moi, mais aussi mon Doudou, et mes amis. Ce n’était pas notre heure. Je pense aussi à toutes les victimes, les blessés, les personnes choquées qui en ont vu et vécu bien plus que moi, les familles endeuillées, les personnes qui sont encore sans nouvelles de leurs proches… qui étaient au mauvais endroit au mauvais moment. Merci à ma bonne étoile.

Je suis très triste et très choquée. J’ai à la fois un sentiment de réalité et d’irréalité. Comme si tout cela n’était qu’un mauvais cauchemar et que j’allais me réveiller. Mais non. Ça s’est bien produit et j’étais bien présente. Je me pince, ça fait mal. Je suis réveillée. C’est dur. Je suis la fille la plus pacifiste du monde (vous pouvez demander à tous les petits insectes en détresse que j’ai déjà sauvé dans ma vie ^^… sauf les moustiques, là c’est eux ou c’est moi, donc à choisir je préfère que ça soit eux ^^), et avoir été témoin d’un attentat, même en n’étant pas véritablement au cœur de ce terrible événement, jamais je n’y aurais cru. On se dit toujours que ça ne nous arrivera pas personnellement, que le jour où ça se produira dans notre ville (parce que ça, pour le coup, j’étais persuadée que tôt ou tard il y en aurait un à Nice), on sera bien tranquille chez soi. Comme quoi.

Et maintenant la vie doit reprendre… faire comme si…